Journal de quarantaine – Jour #43

Journal de quarantaine #43

Déconfiner le journal

Depuis quelques jours, aux côtés de l’acronyme CHSLD se trouve un mot qui prend de plus en plus de place : déconfinement. Le quand, le comment et le pourquoi restent à déterminer, mais en dépit des doutes, le phénomène semble inévitable et même imminent. Nous entamerons sous peu les premières étapes de ce déconfinement.

J’allais vous parler de la peur, de la prudence, de la force des symboles et des manifestations de la violence dans notre imaginaire, mais mon texte errait. Sa trame narrative, à l’instar du déconfinement promis, était floue. Je préfère le laisser reposer et le remettre à demain. Plutôt, je veux prendre acte du déconfinement graduel de mon journal.

Vous aurez remarqué que certains jours ont passé au cours desquels je suis resté silencieux. J’assumerai désormais ce silence nécessaire. J’ai lancé ce journal non pas par défi, mais par besoin. Besoin de m’inscrire dans le monde, de garder les ponts ouverts avec les autres et d’animer, dans la mesure du possible, une vie communautaire. Ces besoins sont en mutation et je ressens le besoin de retourner vers mes projets de création. De m’aérer l’esprit.

Le journal, après tout, est un genre confiné. J’ai beau vouloir l’ouvrir à tous les horizons, il s’inscrit dans un cadre donné, dans un lieu précis, enfermé dans la limite des mots. J’aime penser que les mots offrent un pouvoir illimité. C’est presque vrai, mais ils ne peuvent pas remplacer la présence d’un.e ami.e, le souffle du vent et la chaleur du soleil. Cela dit, je ne ferme pas les livres. Je vous prépare de nouveaux Portraits de crise et j’ajouterai de nouveaux billets, de temps à autre. Mais le rythme d’un texte par jour m’est insoutenable. J’ai besoin de respirer.

Cela dit, permettez-moi de vous inviter à un exercice amusant. Prenez un dictionnaire. Si vous n’en avez pas à portée de main, furetez vers celui que vous avez l’habitude de consulter en ligne. Cherchez-y ce mot : déconfiner. Oui, je sais : il ne s’y trouve pas. Certains dictionnaires vous renverront à l’idée de « déconfiner l’énergie nucléaire », mais pour le reste : rien. Si vous vous rendez sur Wikipédia, vous y verrez que le terme « déconfinement » est, de fait, un néologisme né de la COVID-19.

Est-ce à dire que nous étions auparavant confinés, sans possibilité de nous en sortir? Nous pourrions alors élaborer de grandes théories sur les avenues que nous offre ce néologisme. Comme si la pandémie avait créé une brèche dans le cloisonnement du monde et que la sortie de crise nous inviterait à un monde sans murs ni frontières, un monde ouvert. Un monde déconfiné. Ce ne serait que du vent, bien sûr.

Nous ne pouvons constater qu’un seul fait aujourd’hui : le déconfinement n’existe pas. Pas encore. Il faudra donc l’inventer.

Êtes-vous prêt.es?

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